Je sais que t'es belle mais j'aurai pas le temps de te le dire...

Cette après midi, j'allais acheter mon pain et en tournant un coin de rue, une magnifique petite femme blonde de mon goût m'a fait un beau sourire et un signe de tête quand nos regards se sont croisés. Elle était vraiment mignonne. Elle me connait peut-être mais moi je ne la reconnaissait pas. Elle m'aurait surement fait une bonne amie, j'en suis assez certain.

Malheureusement, je reconnais très bien le visage des gens avec qui j'ai déjà un lien affectif ou amical mais pas celui des autres. Laissez-moi vous expliquer à quel point ça peut être problématique lorsqu'on reconstruit un tissus social presque de zéro.

Mais si tu ne la reconnais pas, qu'est-ce que tu perçois en la regardant ?

Ce que je vois? Sa configuration interne, ses traits de caractère principaux, son humeur du moment, ses vulnérabilités qui la rendent parfois encore plus belle. Parfois j'arrive à dire ce qu'une personne serait possiblement devenue si elle avait suivie sa "configuration initiale" : Avocate, intervenante sociale etc. Des fois je détecte des phéromones quand on se croise mais toutes les femmes en ont. Ressentir que sexuellement tu as probablement intéressé une femme ne te permet pas de la reconnaitre la prochaine fois dans la rue. Toutes les femmes peuvent émettre des phéromones de désir.

Je vois le visage des gens mais je ne le reconnaitrai probablement pas demain parce que trop de détails complexes ont envahi mon cerveau dans un court lapse de temps. Je vois beaucoup plus que les gens normaux dans un regard mais si la personne bouge, je vais capter toute sa complexité intérieure et pas assez son physique en tant que tel. Les mouvements révèlent beaucoup et mon cerveau focusse naturellement là-dessus. Un truc est de regarder une photo fixe d'une personne durant un bon moment pour la reconnaitre mais ... je n'ai pas ça quand je rencontre une étrangère dans la rue qui me sourit donc elle disparait comme une hallucination. C'est cruel un peu.

Je n'ai pas mon 100%

Si je ne suis pas certain à 100% qu'un visage est le bon, même pour un minime doute, je peux passer mon chemin et ne pas saluer. C'est le souci du détail exagéré des autistes. Ça arrive avec des nouvelles fréquentations qui finissent par m'ignorer en croyant que je suis un hypocrite ou autre. J'ai passé tout droit dans la rue sans les saluer. 

Je croise régulièrement des femmes qui me semblent être d'anciennes collègues d'usine mais je ne les aborde pas. En vieillissant, leur configuration interne s'est parfois modifiée, je ne reçois plus les mêmes messages de leur intérieur et mon souvenir de leur extérieur physique est vague. Je ne peux pas être certain à 100% que c'est la même personne. Le moindre changement physique ou de type de linge suffit des fois à me faire douter quand ça fait longtemps que je n'ai pas vu quelqu'un.

Ça vous arrive à vous aussi probablement de mal reconnaitre des visages, je sais mais probablement pas de cette ampleur. Un ASPIE a souvent les mêmes traits que des gens normaux mais ils s'expriment parfois dans un autre degré.

C'est de la torture affective pour un célibataire qui n'a pas de réseau social concret 

C'est comme si mon cerveau va chercher tout seul à identifier les traits intérieurs complexes et ne me donne pas les infos physiques qu'il a utilisé. Il a déjà tout "réglé" pour me donner le meilleur portrait mental d'une personne mais il a oublié de me dire comment la reconnaitre physiquement. Je sais que je l'ai trouvée super sexy et tellement belle, j'ai pu m'imaginer toucher son cou et lui chuchoter des trucs mais quand je la reverrai, ça sera éventuellement encore comme la première fois. 

Est-ce que cette jolie petite blonde que j'ai croisée cette après-midi a entendue parler de moi, me trouve joli ou c'était juste de la politesse? Comment je vais faire pour espérer lui parler le prochain coup si je ne sais pas que c'est la même?  Je la reconnaitrais physiquement si elle était déjà mon amie... mais je ne peux pas être déjà son ami AVANT de la connaitre... donc c'est un cercle vicieux absurde qui mène exactement où je me trouve socialement aujourd'hui. C'est comme la maison des fous d'Astérix.

Développer un lien spécial sur le coin d'un rue à la première rencontre

Même quand le bon hasard place quelqu'un qui semble me trouver de son goût sur le coin d'un rue, je ne peux plus la repérer ensuite à moins d'avoir ses coordonnées ou un lien Facebook, ce qui relève du scénario parfait de film. Dans la réalité ça arrive très peu. Tant que je n'ai pas un lien spécial d'amitié ou d'affection avec une personne, je reconnais très mal les visages. Je distingue ce qu'il y a de plus subtile et caché par contre mais c'est souvent peu utile pour reconnaitre quelqu'un physiquement. Par exemple: Il existe plus d'une femme qui possède le trait de la curiosité extrême. Je ne peux pas me fier sur ce trait détecté chez une passante pour dire que telle femme est la même que l'autre le lendemain.

C'est beaucoup trop rapide ...

La petite très mignonne d'aujourd'hui, j'aimerais ça lui offrir l'amitié pour pouvoir la reconnaitre mais... elle est passée le coin de rue en deux secondes. Elle me prendrait pour un taré mental si je l'abordais tout de suite en lui offrant mon amitié sous prétexte que j'ai vu de très belles choses dans sa personne... en une seconde et demie sur le coin d'une rue. C'est beaucoup trop rapide pour des humains normaux. C'est envahissant pour eux. Chez une femme moyenne, ce serait immédiatement la peur d'avoir un capoté qui va s'obséder d'elle et la suivre partout etc. Je ne peux pas leur reprocher cette méfiance là donc je reçois le beau sourire et son signe de tête, je continue mon chemin déçu qu'il ne se passe pas plus... et je me dis que tout ça, ça fait juste me torturer encore au final. 

Des femmes qui connaissent d'autres femmes ...

Il n'y en a pas de solution à ça sauf essayer de connaitre des femmes qui vont te présenter à d'autres femmes que tu vas ensuite reconnaitre en lieux publiques et pouvoir flirter. 

Les hommes en général ne me présenteront pas leurs amies, même si ils sont déjà en couple. C'est une question de machisme culturel, de compétition, de jalousie mal placée ou de narcissisme et j'ai compris ça rapidement. Si tu es intéressant et cultivé, respectueux et charmant, oublies ça les amis gars qui vont travailler pour te trouver des copines. C'est très très très peu probable même si ça arrive. Il ne faut pas compter là-dessus en bref et du côté des femmes, si vous n'avez pas déjà des contacts, elles ne peuvent pas vous présenter leurs amies. Moi je n'en ai plus d'amies femmes présentes pour moi. Je pars donc de rien avec un problème de reconnaissance faciale qui me pourrit l'existence. 

Et même si j'avais quelques amies qui me fréquentent en vrai, souvent les femmes vont essayer de matcher leur ami obèse ou leur ami qu'elles ne désireraient jamais. Si elles vous ont désiré un peu à un moment donné... elles n'oseront généralement pas vous présenter leur entourage féminin. C'est vraiment juste mon impression basée sur une analyse du subconscient collectif. 

Ils prennent pour acquis leur monde social

Les gens en général ne se rendent pas compte que c'est ingrat comme ça pour moi. C'est parce qu'ils n'ont pas perdu tout leur réseau social à la sortie de l'école. Ils ont tissé une toile sociale très longue à obtenir qu'ils prennent comme acquise et croient simple mais c'est très complexe. Ils connaissent parfois 30 personnes de plus juste par un seul contact commun de l'école secondaire qu'ils ont pu entretenir. Moi j'ai 100 amis Facebook et là-dessus, plus de 70% ne m'ont jamais vu en vrai... ne lisent peut-être même plus mes trucs. 

Les gens ont ZÉRO idée du défi pour un ASPIE de repartir de zéro ses contacts sociaux avec un trouble de reconnaissance faciale. C'est comme une roue perverse sans fin apparente qui rend dingue. Même sur Facebook vous n'avez aucune visibilité parce que presque zéro interactions. Les gens interagissent surtout avec leurs amis, pas des contacts qu'ils n'ont jamais vu en vrai. Vous avez donc l'air sans talents sur Facebook en plus et rejet. Personne ou presque ne commente rien. C'est le néant parce que c'est le néant finalement. 

Le cynisme revient tellement rapidement avec les années

Vous pouvez avoir 99 échecs pour une réussite et vous avez intérêt à avoir encore de l'estime de soi pour le 100e essai parce qu'une femme ne sera pas souvent séduite par quelqu'un de désabusé qui regarde à terre dans la rue en marchant, qui se soule les vendredis soir et titube dans un stationnement. Vous avez intérêt à garder le moral un minimum malgré tout. 

Un moment donné on se tanne et on devient cynique, désabusé et on ne croit plus rien. On voit un femme qui nous sourit beaucoup et on voudrait tellement la reconnaitre le lendemain pour aller une étape plus loin, dire salut, se présenter ou autre. On développe une forme de certitude qu'on n'aura rien. On met la machine affective à OFF parce que c'est un gaspillage pas croyable d'attentes et d'énergie qui ne mène nulle part. 15-20 ans plus tard, on rencontre une femme presque affectueuse qui nous offre un moment spécial de demi-flirt éphémère sur le coin d'une rue et la machine affective se rallume. On ne sait plus quoi faire avec ça... donc on est maladroit et on rate tout.

L'idéal serait une femme qui me croise et dit : " Salut Marc-André, comment tu vas aujourd'hui? " ... et là je saurais que je peux aller plus loin. J'aurais peut-être au moins le temps d'échanger des numéros de téléphone ou autre mais comment une femme peut savoir mon nom avant de me connaitre? Il faut le vivre pour le comprendre je croirais. Je vis à mon compte donc je n'ai pas de collègues de travail proprement dit connaissant déjà mon nom. C'est franchement navrant.

Devenir une personne publique pour régler le problème

À moins que je devienne populaire par le fruit de médias ou de mes créations, c'est plus ou moins mon sort de ne plus jamais développer un tissus social décent et je vous assure que les médias font des check-up. Le seul fait de n'avoir aucun tissus social me disqualifie. J'ai l'air de connaitre personne et n'être appuyé par personne ou presque. C'est automatiquement louche dans leur psyché. 

Les médias ou gens connus du milieu artistique sont méfiants. Ils font des vérifications quand vous les approchez et vous n'aurez pas de réponse si vous n'avez pas déjà un capital d'appui ou des gens qui vous aiment. C'est pas méchant mais c'est cruel et c'est comme ça. Ils ne veulent pas risquer leur réputation sur une personne qui semble n'avoir aucune existence sociale réelle. 

Le cercle est vicieux jusqu'au bout ou presque et c'est en partie ce que je travaille à briser. Ça prend juste une brèche. Moi je suis en train d'en préparer plusieurs de ces brèches pour " forcer" certaines choses mais j'avoue, je manque cruellement d'énergie affective. J'ai un isolement social de presque 20 ans derrière moi. J'arrive de très très très loin comparé aux gens qui ont juste vécu le Covid. 

Et les sites de rencontre?

Les femmes en général en 2025 choisissent souvent des amis, amants ou amoureux qui sont déjà épanouis, pas quelqu'un qui recommence à zéro en début quarantaine. On n'est pas complètement épanoui quand on n'a aucun tissus social tant qu'à moi sauf si on déteste l'humain en partant. Pour des femmes qui fonctionnent dans un culte de la consommation et du risque zéro, je suis un risque énorme en tant qu'ancien isolé social. Aller sur un site de rencontre me ramène au même problème en pire car quand les gens paient pour un service, ils cherchent à avoir un produit parfait... et déjà ça n'existe pas. 

En conclusion :

J'ai intérêt à être convainquant en calvaire sur le coin d'une rue pour persuader une parfaite inconnue de devenir mon amie parce que je vois en elle toutes sortes de choses qu'elle ne voit parfois même pas elle-même. 

Tout ce que j'essaie de faire dans ce délire de cercle vicieux, c'est de ne pas perdre la raison finalement parce que l'être humain n'est pas fait pour vivre comme ça dans une bulle en dehors des autres. 

Tout ça se résoudrait tellement facilement si j'avais évolué comme Mike Ward. Tout le monde ou presque va vers lui. Il n'aura jamais concrètement à chercher des contacts sociaux. Il doit en revirer de bord constamment tellement il y en a et son absence de filtre passe super bien en humour. C'est là qu'on voit que d'un ASPIE à l'autre, il peut y avoir des montagnes de souffrances en différence même si au plan médical, les deux ont la même chose. 

Je me demande comment je vais finir par gérer ce problème de reconnaissance faciale mais il va bien falloir. 

A+ 

Marc-André Noiseux / 2025-08-03 · 02:45